Pour les capitalistes, les dépenses pour la santé des travailleurs sont inutiles. La lutte des classes pour la préservation de notre système de santé devient de plus en plus brutale.

La crise du coronavirus a dévoilé l’état affaibli du système de santé. Le charge supplémentaire dans les hôpitaux a été brutalement reportée sur le personnel de santé. L’insuffisance des salaires et l’excès de pression mettent en danger la santé des employés et des patients. Les raisons qui expliquent ces faits sont la politique d’austérité de l’État et la recherche du profit du capitalisme. Aujourd’hui, les capitalistes prévoient de nouvelles attaques contre la santé. Nous devons préparer une résistance contre cette menace. Pour ce faire, nous devons comprendre les lignes de classes dans le secteur de la santé. Nous avons abordé les problèmes des cliniques privatisées dans l’article « Lutte des classes à l’hôpital ? (L’étincelle nº38). Cet article traite en outre de la réglementation et du financement du système de soins de santé par l’État. Alors que les travailleurs se battent depuis 150 ans pour un système basé sur la solidarité, la classe dirigeante mine les progrès réalisés.

La santé a un prix

Les soins médicaux en Suisse sont très bons, comparés à l’échelle mondiale. Pour les capitalistes, le système de santé suisse est trop cher. Mais qui paie la facture en fin de compte ? Les salariés créent la valeur grâce à leur travail. Pourtant, ils ne reçoivent qu’une fraction de cette valeur sous la forme d’un salaire. Cela correspond à la valeur nécessaire à la reproduction des travailleurs : pour nourrir, habiller, loger et aussi pour leur fournir des soins médicaux. La différence entre le salaire et la valeur créée est la plus-value que l’employeur empoche en premier lieu sous la forme de profits. Le montant des salaires est déterminé dans la lutte entre les travailleurs et les capitalistes. Pour acheter des services médicaux, les travailleurs exigent un salaire plus élevé. Les capitalistes résistent afin de maintenir leur profit. C’est la lutte des classes. Les salariés ont dû se battre pour le système de santé actuel. Au XIXe siècle, presque personne ne pouvait s’offrir des soins professionnels. Les travailleurs ont fondé des syndicats pour lutter afin d’obtenir des salaires plus élevés et des fonds de secours pour mettre en commun l’argent destiné aux malades. Les grèves, les manifestations et la menace d’une révolution sociale ont obligé les capitalistes à faire des concessions dans la politique de santé. Une des conséquences de la grève générale de 1918 a été l’instauration de l’assurance maladie obligatoire dans certains cantons. La proportion d’assurés est passée de 10 à 50% pendant l’entre-deux-guerres. Les compagnies d’assurance maladie ont été subventionnées par l’État et ont fusionné pour former de grandes institutions influentes. Pendant l’extraordinaire essor économique de 1945-1975, une forte expansion du système de santé a été possible. Les cantons ont utilisé l’argent des impôts pour construire les grands hôpitaux que nous connaissons aujourd’hui. Les concessions collectives de la classe dominante ont été organisées et médiatisées par l’État bourgeois. La lutte des classes a ainsi été complétée par un nouveau front au niveau politique. Les capitalistes ont donc été contraints de rendre une partie de la valeur aux travailleurs de deux manières. Plus le salaire est élevé, plus les travailleurs ont la possibilité de s’assurer. Par le biais des impôts, les capitalistes ont dû participer aux subventions de l’État pour l’assurance maladie. Mais cela suppose que la classe dirigeante fasse suffisamment de profits. Ce n’est qu’alors qu’ils ont la possibilité de faire des concessions. Les travailleurs se sont battus pour obtenir encore plus de droits au niveau international dans de nombreux endroits. En Grande Bretagne, le Service national de santé a été créé pour fournir des soins complets financés par l’État. En Suisse, par contre, les salariés paient encore la moitié des services de santé directement, par exemple par le biais des primes et des franchises de l’assurance maladie.

Une politique d’austérité destructrice

 La crise économique mondiale de 1974/ 75 a obligé la classe dirigeante à changer de politique. De nombreux acquis sociaux sont devenus trop chers pour eux. Leur nouvelle orientation, désormais connue sous le nom de néolibéralisme, vise à augmenter les profits des capitalistes aux dépens des travailleurs. Le système de santé a également été ciblé. En 1975, le gouvernement fédéral a réduit les subventions des caisses d’assurance maladie et des cantons. Ces mesures d’austérité, ainsi que d’autres, visaient à accorder des réductions d’impôts aux entreprises. Des hôpitaux ont été fusionnés et fermés. Ces privatisations ont été doublement bénéfiques pour le capital : non seulement les impôts ont été réduits, mais les cliniques privée sont également offert de nouvelles possibilités d’investissements rentables. Les travailleurs ont dû payer de plus en plus de frais de santé de leur propre poche. Les franchises et les primes d’assurance maladie ont augmenté. La part de l’État dans les coûts du système de santé est passée de 19%à 15 %entre 1980 et 2000. Les réductions de primes individuelles ont remplacé les subventions à l’assurance maladie à partir de 1996. Depuis lors, ces réductions ont été régulièrement revues à la baisse. Aujourd’hui, un quart de tous les assurés dépendent de ces réductions. Néanmoins, ces personnes dépensent en moyenne 14% de leurs revenus en primes. La crise économique mondiale de 2008 a donné un nouvel élan aux capitalistes suisses. En 2012, le financement des hôpitaux a été modifié afin d’augmenter la pression pour faire des économies dans les hôpitaux. Le résultat, qui est encore visible aujourd’hui, est que les conditions de travail des employés sont attaquées et que les soins médicaux en souffrent. Le reste des travailleurs est écrasé par les primes excessives de l’assurance maladie, d’autant plus que les primes sont de plus en plus réduites et que les salaires stagnent.

Contre ce système malsain

 Cette brève histoire du système de santé suisse renferme trois conclusions stratégiques pour les combattants en faveur de soins de santé décents. La santé, c’est la lutte des classes ! Afin de financer les coûts des soins de santé, les profits des capitalistes doivent nécessairement être réduits. Les capitalistes vont alors nous combattre sur tous les fronts. Les appels moraux à la classe dirigeante et à ses politiciens sont donc inutiles. La lutte des classes fait également rage à l’intérieur de l’hôpital. Les travailleurs de la santé sont directement exploités par le capital. Le capitalisme en crise ne donne pas de place à notre santé ! La classe dirigeante veut assurer sa position économique. Il réduit donc les salaires, privatise les hôpitaux et fait des économies dans les maisons de retraite. Dans la profonde crise systémique actuelle, les capitalistes mettent en péril notre santé. La crise du coronavirus a été très claire : les patrons tolèrent que leurs employés soient infectés par le virus afin que leurs profits soient assurés. Nous ne pouvons plus accepter ce système malsain ! Le profit et le manque de ressources n’ont pas leur place dans les soins de santé. La meilleure prise en charge possible des patients nécessite suffisamment de temps et de personnel. Les cliniques privatisées doivent être à nouveau nationalisées et gérées par les employés. Toutes les mesures d’austérité doivent être inversées et les soins de santé doivent être financés par des taxes sur les profits des capitalistes. La lutte pour des soins de santé de haute qualité et abordables a le potentiel d’unir toute la classe travailleuse dans la solidarité. Luttons ensemble contre le système malsain !