Ces dernières années, partout dans le monde, on a vu des mouvements émerger qui, partant de revendications « féministes », ont mené à des débats et des actions politiques beaucoup plus larges.

En janvier, le manifeste pour la grève des femmes en Suisse a été publié. Ce mouvement se situe dans la continuation des dernières mobilisations pour l’égalité des genres. Que ce soit aux Etats-Unis avec la campagne #MeToo, en Argentine autour du mouvement pour la légalisation de l’avortement ou la grève féministe du 8 Mars en Espagne, à chaque fois on voit une grande partie de la population occuper les rues, les médias et les réseaux sociaux. Ces mobilisations témoignent d’une nouvelle prise de conscience face à l’oppression des femmes et son lien avec l’exploitation capitaliste. Les slogans et les discours présents cherchent à réévaluer le système, mais quel est le système à la base de la violence de genre? Comment ces mouvements peuvent-ils mener à des vraies transformations sociales?

D’où sort cette violence?

À travers l’histoire, les mouvements pour l’émancipation des femmes ont toujours été intrinsèquement liés aux conditions politiques et économiques dans lesquelles ils émergent. L’actuelle vague de mobilisations internationales est apparue suite à la crise mondiale de 2008 et l’élément commun qui les traverse est la violence. Féminicides, harcèlements, viols, toutes les variations de la violence de genre s’accentuent aujourd’hui avec la détérioration des conditions de vie et la précarisation induites par la crise. Au Royaume-Uni les cas de violences domestiques ont augmenté de 23% entre 2017 et 2018[1], tandis qu’au Brésil le chiffre a triplé entre 2008 et 2015[2]. En Suisse ils ont augmenté de 10% entre 2012 et 2016[3].

La campagne #MeToo a mis en évidence à quel niveau l’harcèlement et la violence sexuelle sont répandus, notamment sur le lieu de travail. En Suisse, 31 % des femmes y ont été harcelées au moins une fois. En période de crise, les femmes qui détiennent majoritairement les emplois à temps partiel et précaires sont les premières à être licenciées. Le sexisme exacerbe la violence inhérente au rapport salarial, au chantage d’un patronat majoritairement masculin.

Faire grève contre les violences structurelles

La prochaine grève des femmes en Suisse est inspirée de la grève de 1991 mais aussi de celle du 8 Mars 2018 en Espagne. Dans ce pays qui n’a pas pu se récupérer depuis la crise de 2008, les industries féminisées telles que l’éducation et les soins ont fortement été touchées par les mesures d’austérité. Les travailleuses sont nombreuses à vivre sous des conditions de travail précaires (les femmes représentent 72% des salariés à temps partiel[4]) et l’écart salarial atteint le 24%[5]. Tous ces éléments condamnent les femmes à vivre sous la dépendance des hommes.

Durant la grève de 24 heures, des millions d’espagnol-e-s ont occupé les rues pour exiger des actions concrètes contre la violence de genre, l’inégalité salariale, la discrimination sexiste et la répartition sexiste des tâches domestiques qui repose presque exclusivement sur les femmes. Le succès d’une telle mobilisation est l’expression d’une prise de conscience accrue de l’intérêt de classe des femmes prolétaires, durement attaquées suite à la crise.

Comment continuer?

Partout dans le monde les mouvements des femmes manifestent de plus en plus un caractère de lutte de classe. Tout en insistant sur la condition spécifique de la femme prolétaire, ils participent d’une dynamique plus large à la radicalisation de la classe ouvrière face aux attaques des capitalistes.

Ce que nous montre l’exemple espagnol, c’est que les couches les plus avancées du mouvement de la grève des femmes, tout comme du mouvement ouvrier, ont évolué d’elles-mêmes vers la nécessité d’une lutte unifiée. Le potentiel de la grève des femmes ne peut se réaliser qu’en tant que grève générale du prolétariat. En s’affirmant comme lutte de classe ce mouvement peut mener à des véritables transformations.

Lutter pour l’émancipation de la femme prolétaire, c’est lutter pour l’émancipation de la classe prolétaire. Le travail dans ces mouvements implique de montrer constamment les contradictions du capitalisme qui mènent à cette violence meurtrière. Seulement en luttant pour le socialisme peut-on arriver à éradiquer la violence de genre et le sexisme.

Source image: duna.cl

[1]https://www.ons.gov.uk/peoplepopulationandcommunity/crimeandjustice/bulletins/domesticabuseinenglandandwales/yearendingmarch2018

[2]http://www.scielo.br/scielo.php?script=sci_arttext&pid=S1413-81232017002902873

[3]https://www.rts.ch/info/suisse/7799254-les-violences-domestiques-ont-augmente-en-suisse-en-2015.html

[4]http://www.ugt.es/miles-de-afiliados-de-ugt-participan-en-las-multitudinarias-manifestaciones-por-la-igualdad

[5]http://www.luchadeclases.org/estado-espanol/62-movimiento-obrero/2612-huelga-feminista-del-8-de-marzo-que-huelga-necesitamos.html