Alors que le gouvernement libéral s’entête à appliquer ses mesures d’austérité, les travailleurs et les étudiants se mobilisent pour les combattre. L’esprit de 2012 est dans l’air et les chefs syndicaux promettent une escalade d’actions pour protester contre les coupures, un printemps et un été «chauds». L’appel à des actions de grève ou même à une grève générale de tous les travailleurs de la province gagne en vigueur, si bien que les leaders syndicaux se sont trouvés obligés de donner leur opinion à ce sujet. S’ils sont prêts à faire le saut, les conditions seront en place pour un combat d’envergure.

publié le 18 mars 2015

Le gouvernement continue à affirmer qu’aucune action de grève ne sera tolérée. Si les actions du gouvernement libéral en 2012 peuvent démontrer de quelque manière la façon dont il répondra à un mouvement de défiance de masse, c’est qu’il ne reculera pas devant quelques manifestations ou même face à une grève étudiante prolongée. Les travailleurs doivent être amenés dans la lutte de manière concrète. Seule la classe ouvrière a le pouvoir de mettre un frein à l’économie et de forcer la main au gouvernement.

Malheureusement, les leaders syndicaux ont tergiversé sur sur la question d’organiser une grève générale pour contrer l’austérité. Le président de la CSN, Jacques Létourneau, a été cité dans Le Devoir

disant: «Le mouvement syndical exclut la tenue d’une grève générale illimitée.» Cela a causé une vague d’opposition chez plusieurs travailleurs qui sont inquiets que le leadership décide de quelles actions sont acceptables sans aucun vote ou consultation des membres. Ce sentiment est évident dans une lettre du président du syndicat des professeurs du cégep Marie-Victorin, Charles Lemieux, à Létourneau et à la vice-présidente de la CSN, Francine Lévesque. Cette lettre réprimande Létourneau et Lévesque, en affirmant que «Notre Assemblée générale considère qu’il est inacceptable que nos représentant-e-s engagent publiquement les membres de notre syndicat sur la voie des concessions et excluent d’emblée le recours à la grève générale alors que nous sommes à organiser une lutte décisive pour défendre nos conditions de travail et les services publics contre une offensive néolibérale d’une ampleur sans précédent. » De plus, les travailleurs de la santé de Sept-Îles ont voté en janvier à 89% «pour des moyens de pression pouvant aller jusqu’à la grève générale illimitée, et ce, au moment jugé opportun».

On voit maintenant que la pression de la base commence à percer à la surface, et quelques leaders syndicaux ont commencé à parler d’organiser une grève générale le premier mai. Dans une vidéo publiée en ligne le 21 février, Marc Ranger ( le président de la Coalition des travailleurs municipaux, représentant près de 65,000 travailleurs ) Marjolaine Aubé (présidente du Syndicat des travailleurs et travailleuses du CSSS de Laval – CSN) et Gilles Tremblay ( conseiller à la Fédération de la santé et des services sociaux – CSN) s’entretiennent au sujet de l’organisation d’une grève générale le premier mai. Dans cette vidéo, Marc Ranger déclare :« Il faut brasser la cage comme il n’y a jamais eu. Le 1er mai, il y a déjà eu 100 000 personnes, il faut que ce soit historique. J’ai commencé à parler de l’idée, nos gens embarquent… surtout le concept de 24 heures de grève sociale, ça frappe l’imaginaire » « On va leur offrir un vrai congé férié, on ferme la province, on ferme les ponts » a ajouté Marjolaine Aubé. « Les votes de grèves légales arrivent vers le mois d’avril, la convention collective va être finie et on va pouvoir déclencher la grève contre l’austérité», surenchérit Gilles Tremblay.

Malheureusement cela a été immédiatement suivi par des déclarations confuses de chefs syndicaux de la ville de Québec, disant qu’ils n’avaient pas de plans précis pour la mobilisation du premier mai, et qu’ils se concentreraient sur la contestation en Cour des mesures d’austérité. Aussi, il n’y a encore eu aucune annonce publique d’un plan concret de grève générale de 24 heures de la part d’un syndicat, mais la pression monte clairement. Une grève de 24 heures qui stopperait toute la province serait une démonstration de force claire. Cela montrerait aux travailleurs leur propre force et leur donnerait confiance.

Pas de compromis, on ne recule pas !

L’expérience du mouvement des travailleur-euses au Québec montre que chaque fois qu’ils pose un défi sérieux au gouvernement sous la forme d’actions de grève de masse, le gouvernement crée rapidement une “loi spéciale” pour leur retirer le droit démocratique de grève. Cela a été le cas avec la grève générale du front commun de 1972, la grève des professeurs de 1982, des infirmières en 1999 et plus récemment avec la grève de la construction en 2013. Tous ces mouvements ont été forcés par la loi de retourner au travail. Comment devrait-on réagir devant les attaques du gouvernement et des patrons, s’ils n’ont qu’à adopter chaque fois des lois autoritaires pour nous ôter nos droits ? C’est une question sérieuse, à laquelle les travailleurs et travailleuses à travers la province demandent une réponse ferme de la part de leurs leaders.

Récemment, les leaders ont fait une tournée provinciale où ils ont tenu des forums publics dans chaque communauté pour parler des mesures d’austérité du gouvernement et des mobilisations pour les combattre. « Dans trois ou quatre régions, je me suis fait demander si j’étais prêt à aller en prison. Il y a des membres qui sont prêts à défier un décret ou une loi spéciale », a relaté M. Boyer. Il s’agit d’une allusion claire à l’emprisonnement de trois chefs syndicaux lors du front commun de 1972, dont Louis Laberge, président de la FTQ à l’époque, pour avoir défié la loi de retour au travail. Les leaders actuels sont-ils prêts à aller jusque-là? La classe ouvrière au Québec renoue avec ses traditions révolutionnaires de lutte des classes, et demande un leadership constant et ferme, qui n’aura pas peur de poser les actions nécessaires et fera ce qu’il faut pour défendre leurs intérêts.

Vu la crise globale du capitalisme, le gouvernement n’a pas de marge de manœuvre et défend les intérêts des capitalistes plus clairement que jamais. Nous ne pourrons obtenir le confort d’un accord bonbon comme par le passé. Seule une lutte de masse de la part de la classe ouvrière québécoise pourra forcer le gouvernement à reculer et stopper les mesures d’austérité. De la faiblesse et de l’hésitation de la part du mouvement inviteront le gouvernement à l’agression, il est donc nécessaire d’agir de façon ferme et décisive. Malheureusement il y a eu beaucoup de tergiversations sur la question de la grève générale de 24 heures, ce qui démontre de la confusion au sein des travailleurs et affaiblit les mobilisations contre le gouvernement.

Les leaders syndicaux doivent mettre un terme à cette confusion et faire un appel commun à une grève générale de 24 heures contre les mesures d’austérité ! Cela doit être plus qu’une simple déclaration. Une grève générale est un engagement sérieux et doit être organisé, pour assurer que les travailleur-euses sortent en pleine force. Une vraie grève générale affecte plus que les travailleur-euses syndiqués, des efforts doivent être faits pour aller chercher tous les secteurs des travailleur-euses et des opprimés. Des comités solidaires devraient être créés dans toutes les communautés afin d’unir tous les secteurs; syndiqués ou non, jeunes et étudiants, femmes et immigrants etc… Une grève d’un jour en essence est une démonstration de force, une manifestation de masse du pouvoir de la classe ouvrière. Espérons qu’un tel événement suffira à repousser l’austérité du gouvernement, mais s’il refuse de reculer, des actions à portée plus large devront être préparées.

Les chefs syndicaux sont-ils prêts, toutefois, à faire le nécessaire pour contrer les attaques du gouvernement libéral ? La trahison du mouvement de grève générale il y a 10 ans laisse un goût amer chez plusieurs travailleur-euses. Nous devons combattre pour avoir le contrôle démocratique sur nos organisations et nos leaders de la base vers le haut. Il est vital que les membres contrôlent le mouvement. Chaque négociation impliquant la base doit être discutée à la base. Nous ne pouvons laisser faire ce genre de tractations en coulisses par des bureaucrates sans vote démocratique des travailleur-euses.

Les idées qui seront propagées par ce mouvement sont de première importance. Nous devons nous battre pour la propagation des idées et méthodes correctes qui pourront mener cette lutte à la victoire. La crise économique qui a commencé en 2008 persiste et ne montre aucun signe de récupération. L’austérité n’est donc pas simplement idéologique, mais liée de manière inhérente à la crise du système capitaliste. Pour la vaincre, nous devons vaincre le capitalisme lui-même et créer une nouvelle société basée sur les besoins humains et non le profit des corporations. La lutte pour une perspective socialiste au sein du mouvement est la lutte pour des idées qui peuvent défaire l’austérité une fois pour toutes. C’est le but de La Riposte ici au Québec. Si vous êtes d’accord avec nos idées, rejoignez-nous dans la lutte et battez-vous pour des idées qui peuvent gagner !

Joel Bergman
La riposte – TMI Québec
www.marxiste.qc.ca