Une vague de solidarité traverse la classe ouvrière, qui est majoritairement féminine sur le front de la pandémie. En parallèle, les travailleuses subissent une attaque constante de la part du capital. Un cocktail explosif.

« Je vais au travail par solidarité avec mes collègues et les personnes qui ont besoin d’aide et qui n’y peuvent rien à ce système capitaliste. S’il vous plaît, mettons-nous tous en grève après cette première vague du virus ! » Cette citation d’une employée d’hôpital zurichois a été partagée plus de 500 fois sur les réseaux sociaux. Elle démontre clairement l’état d’esprit du personnel infirmier. Les femmes des secteurs « essentiels » sont particulièrement touchées par la pandémie et la crise économique. En même temps, ces femmes gagnent une nouvelle confiance en elles. Ce cocktail explosif indique les perspectives pour la période à venir.

Le capitalisme n’a rien à offrir

Au cours des quarante dernières années, les capitalistes se sont engagés -et ce à l’échelle internationale-dans une attaque agressive contre le conditions de vie de la classe ouvrière. Les travailleuses ont été frappées à deux niveaux : comme salariées et commetravailleuses domestiques. Depuis des décennies, les emplois « typiquement féminins » (santé et soins, services sociaux, éducation, nettoyage etc.) sont assaillistant par les politiques d’austérité et de privatisations dans le secteur public que par des attaques directes dans le secteur privé. La destruction de « l’État providence » signifie aussi un alourdissement dudouble fardeau des femmes :les soins aux personnes âgées et aux malades ainsi quel’éducation des enfants sont de plus en plus renvoyés dans la sphère privée, donc à la charge des femmes. Le capitalisme en déclin n’a plus rien à offrir, particulièrement aux femmes travailleuses. Pour les générations qui ont grandi pendant la crise capitaliste, ce système se révèle être un cercle vicieux de crises économiques, de catastrophes climatiques, de guerres, de pauvreté, de flux de réfugiés et de répression. Les travailleuses constatent l’énorme contradiction entre l’égalité officielle dans la loi et leur position réelle dans la société. Le sexisme, la discrimination au travail, la violence et la double charge croissante sont leur expérience quotidienne. Tout cela laisse des traces profondes dans leur conscience. Les processus de radicalisation qui couvaient depuis des décennies montent à la surface ces derniers temps.

Les femmes gagnent du terrain

D’une part, les professions « typiquement féminines » ont commencé à bouger : en 2018 de grands mouvements de grève du corps enseignant ont traversés les Etats-Unis et la Pologne. De l’Autriche à la France, en passant par la Grande-Bretagne, l’Allemagne etc., nous avons assisté à des luttes et des grèves dans les hôpitaux et les services d’urgence. D’autre part, il y a eu des mouvements de masse internationaux des femmes et de la jeunesse : d’abord le mouvement mondial MeToo, puis en 2018-19 le mouvement de grève des femmes, qui a pris des traits révolutionnaires en Espagne et en Amérique latine. En Suisse, la grève des femmes de 2019, qui a compté près d’un demi-million de personnes, a été la plus grande manifestation en près de 30 ans.. C’est sur ce terrain radical qu’a frappé la crise du corona – pour en accentuer encore la radicalisation.

Corona : la poudrière des contradictions

La crise du coronavirus est un catalyseur au niveau mondial. La crise économique qui sommeillait se déclenche simultanément dans tous les pays. Les coupes synchrones des prestations sociaux et ceux de soins ont également mis la Suisse à l’épreuve, révélant d’énormes lacunes. Les professions féminines, au front face à la pandémie, sont frappées de plein fouet.Le personnel soignant est au bord de l’effondrement, les vendeuses sans masques de protections, les enseignantes dans le chaos le plus total, les mères au travail sans possibilité de garde pour leurs enfants.. Les foyers pour victimes s’attendent à une forte augmentation de la violence domestique,déjà observée en Italie et en Chine. Voilà la réalité du confinement. Les effets de la crise économique seront encore plus importants. Les fonds publics employés par le Conseil fédéral pour sauver les entreprises et les banques impliquerontbientôt les mesures d’austérité les plus sévères. Dans le secteur privé comme dans le public, les mêmes recettes vieilles de quarante ans seront toujours appliquées, mais plus fermement : il y aura davantage de coupes dans les secteurs de la santé et de l’éducation, des conditions de vie et de travail encore plus mauvaises, particulièrement pour les femmes salariées. Le « corona-catalyseur » a cependant un effet très particulier. La classe ouvrière et surtout les « emplois féminins » sont passés au centre de l’attention générale à cause de la pandémie et mesures de confinement. Le rôle décisif des femmes actives dans le fonctionnement de la société est devenu évident non seulement pour elles, mais pour l’ensemble de la classe ouvrière. Ce ne sont pas les patrons, les banquiers et les bureaucrates qui font fonctionner la société mais les soignantes, les nettoyeuses et les vendeuses. La « reconnaissance » des patrons et de l’État bourgeois est cynique : en même temps, ils passent des mesures d’extension du temps de travail et de réduction des coûts. Mais celle des salarié-e-s est tout à fait honnête ! Elle indiquesignifie une énorme solidarité de classe. Non seulement ces professions sont remerciées quotidiennement et leurs témoignages sur le front sont diffusés sur les réseaux sociaux, mais il existe aussi d’innombrables exemples de solidarité directe avec ces employé-e-s essentiel-le-s : des milliers de bénévoles prennent en charge leurs achats, la garde de leurs enfants etc. Et ce n’est pas tout : les femmes travailleuses voient beaucoup plus clairement que la logique de profit du capitalisme va à l’encontre de leurs intérêts. Elles voient que celui-ci est responsable de leurs conditions de travail misérables et est contraire à leur santé physique et mentale. Une infirmière commentait : « Durant la crise, l’orientation des hôpitaux vers le profit devient évidente. Une nouvelle conscience émerge au sein du personnel. La plupart de mes collègues souhaitent un retour à la normale des activités quotidiennes. Mais avec un meilleur salaire et une augmentation du personnel. » Le virus ne déclenche donc pas juste une crise économique, il donne également un énorme coup de pouce à la confiance et à la conscience de classe des femmes travailleuses. Ces travailleuses ne se contenteront plus de subir des mauvaises conditions de vie et de travail et d’attendre la prochaine attaque contre elles. La déclaration d’une employée de Spitex est emblématique de la volonté de lutte de nombreuses personnes : « Le public a les yeux rivés sur nous, les travailleuses, et voit à quel point nous sommes importantes. J’en tire de la fierté, mais aussi la confiance de me battre pour mes droits. Notre tâche est de continuer à promouvoir cette conscience de classe. »

Optimisme militant!

Nous voyons l’étendue de la poudrière qu’est la période à venir : crise économique, chômage, attaques renouvelées et intensifiées des capitalistes sont à nos portes. Ces attaques, cependant, vont frapper la conscience de classe nouvellement acquise par les travailleuses ainsi que la solidarité de la classe ouvrière avec elles. N’oublions pas : ce sont les mêmes travailleuses et jeunes femmes qui ont déjà combattu dans la rue et à l’usine ces dernier temps, et qui ont acquis leurs premières expériences de lutte. Ces femmes vont se battre ! Les luttes à venir tourneront autour de la question de savoir qui doit payer pour cette crise du système. Les intérêts des capitalistes s’opposent à ceux des travailleuses. Tout compromis avec les patrons, les banquiers ou l’État bourgeois est impossible: seule la lutte la plus acharnée dans les usines et dans la rue nous permettre d’obtenir des progrès pour nos conditions de travail et notre niveau de vie. Le capitalisme pourrissant n’a plus rien à offrir aux femmes – alors organisez-vous avec nous pour la libération des femmes et le socialisme !